Nouakchott: la ville champignon

Par Amadou Seck
Nouakchott DR
Nouakchott DR

Capitale de la République Islamique de Mauritanie, Nouakchott (Nwakshut) «est située sur la façade atlantique saharienne par 18 degrés 06 Nord et 15 degrés 57 Ouest, sur une plaine où alternent dunes et dépressions salées.

«L’appellation dérivait d’akshudan, nom amazigh d’un type de coquillage caractérisant son sous sol», selon la présentation géographique qui en est faite par Elémine Ould Mohamed Baba, professeur d’histoire à l’Université de Nouakchott «ASSRYA».

Grâce à une plongée dans les origines les plus lointaines de la ville champignon, fondée à la fin des années cinquante, qui représente aujourd’hui la capitale politique et la plus grande concentration humaine en Mauritanie (plus d’un million d’habitants pour une population totale de près de 3,8 millions d’âmes en 2016), ce spécialiste nous permet de faire une connaissance approfondie de la cité.

D’après ce chercheur, l’appellation de la ville vient de «inwakshudhan», un puit de coquillage situé sur le parcours de transhumance des tribus du littoral, qui voit la construction d’un fort colonial en 1902, mais sa fonction de relai sur la route entre le Sénégal et le Nord de la Mauritanie, qui favorisera durant les années 1930, l’établissement du petit village du Ksar, embryon de la future ville, est venue plus tard.

Une évolution qui s’inscrit dans  la perspective de l’indépendance de la colonie mauritanienne, administrée jusque-là à partir de Saint-Louis (du Sénégal). Ainsi, le site est choisi en 1957 pour abriter la capitale de la future République Islamique de Mauritanie.

Un éphéméride plus proche dans le temps est servi aux lecteurs  à travers un ouvrage sous le titre «Nouakchott, capitale de la Mauritanie: 50 ans de défis», réalisé par un collectif d’auteurs dont Jean-Robert Pitte, Armelle Choplin, Sébastien Boulay et Boubacar Dionne, à l’occasion de la célébration du cinquantenaire de cette cité.

Ce travail, qui accompagna une exposition consacrée à la ville en 2008, permet de jeter la lumière sur «une jeune capitale surgie des dunes de sables, face à l’océan, née en même temps que l’Etat de Mauritanie, de sa création à nos jours».

Il est constitué d’un condensé d’écrits littéraires et journalistiques, de témoignages et d’articles scientifiques, tous illustrés, qui  retracent la genèse de la capitale, sa croissance depuis la création et les perspectives d’évolution.

Jadis bourgade de quelques milliers d’habitants, la ville concentre aujourd’hui un tiers de la population mauritanienne dont la diversité ethnique est l’une des richesses.  

Au cœur d’un développement spatial et démographique aussi spectaculaire qu’incontrôlé, Nouakchott fait face au défi d’apprivoiser et maîtriser cet essor sans perdre son âme avec comme  enjeu «de sauvegarder la mémoire et préparer l’avenir».      

 

Mémoire de Nouakchottois à travers la chronique du temps qui passe

 

Fortement attaché à la capitale mauritanienne et féru d’histoire, le professeur Elémine ould Mohamed Baba a longtemps tenu une chronique sous le titre de «Mémoire de Nouakchottois» à travers laquelle il racontait des faits liés à l’enfance et une foule d’anecdotes sur la ville pendant les années 60/70, dans les colonnes du célèbre hebdomadaire «Le Calame», journal fondé en 1993 par feu Habib ould Mahfoud. Une page qui gagna rapidement ses lettres de noblesse devenant «la chronique du temps qui passe».

Celle-ci prend alors la forme d’une fresque à travers laquelle «l’auteur évoque les pans de toute une période, une tranche de vie des adolescents de l’époque, riche en péripéties».

Le résultat est l’émergence d’une cité «avec une génération d’enfants de bédouins nomades que l’histoire a subitement projetés vers un nouveau statut de citadins et sédentaires, un changement par rapport à la tradition et la culture de leurs ancêtres», écrivait en 2001 le Pr Dah ould Mimoun, en guise de préface à un recueil regroupant toutes les chroniques parues à travers «Le Calame».

Fait inédit et inversion par rapport à l’histoire administrative de la Mauritanie et la tradition un peu partout ailleurs, Nouakchott est une ville composée de trois régions dirigées par des walis (gouverneurs).

D’après des documents officiels, il s’agit d’une agglomération qui représente 25% de la population nationale, 56% de la population urbaine de la Mauritanie, 60% de la population de moins de 30 ans, une croissance démographique rapide de 4,3%, accompagnée par un étalement horizontal rapide rendant difficile la réponse aux besoins accrus surtout pour les services de base (eau, électricité,  assainissement, éducation, santé…). Le taux de raccordement en eau est estimé à 65%  et celui de l’électricité 55% (réseaux concentrés au sein des zones riches).

Nouakchott souffre également d’une situation environnementale difficile dans un contexte de changement climatique, avec des risques de submersion marine provoquée par la montée de la mer qui se trouve à un niveau plus élevé que la ville (beaucoup de quartiers se situent sur une altitude de parfois -4m) des risques d’inondation par des eaux de pluies (le réseau d’égout ne couvre que 30 kilomètres).

 

Un chapelet de défis au quotidien

 

La description de la réalité humaine, économique, sociale et environnementale de l’agglomération de Nouakchott renvoie à un chapelet de défis, des questions existentielles dont les réponses conditionnent l’avenir dans une perspective politiquement apaisée.

Face à ces problèmes, la présidente du Conseil Régional, Fatimetou mint Abdel Malik, dotée d’une expérience de l’administration municipale pour assumer pendant plusieurs années les charges d’édile de la commune de Tevragh-Zeina (la vitrine de la capitale mauritanienne), affiche ses ambitions.

Ainsi, il a été élaboré dans le cadre d’une démarche participative, un plan de développement régional pour la période 2020/2024.

Cette vision porte sur «une région prospère, avec une économie dynamique, diversifiée et compétitive, bien gouvernée de manière durable, résiliente et ouverte au progrès scientifique, technologique, respectueuse des droits de sa population multiculturelle, solidaire et citoyenne».

La réalisation de cette ambition se décline à travers quatre axes stratégiques portant sur le renforcement de l’accès équitables des citoyens aux services sociaux  de  base de qualité, le développement des activités économiques diversifiées, en mettant en valeur l’innovation et la technologie et la promotion de la bonne gouvernance.